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REGISTRES D
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Nostre Dame, comme ayans satisfaict ai la delibera­tion de lad. Ville du xvii0 Mars mil v° xlvii avant Pasques ''', en payant par chascun an les louaiges ordonnez par icelle deliberation. Aussi sera led. Bournay entretenu au louaige de Ia maison qu'il tient sur le pont Nostre Dame de lad. Ville en payant ce qui est ordonné par lad. deliberation dud. xvii0 Mars mil vc xlvii; a icelle Court faict inhibitions et deffenses aud. Bournay et tous aultres locataires demourans sur le Pont Nostre Dame de associer avec eulx aultres compaignons en leurs louaiges'2', et de besongner du groz marteau sur enclume ès maisons assises sur led. pont, sur les peynes conle-nues ès baulx à louaiges à eulx faictz par lad. Ville. "Prononcé le xiiii" jour d'Aoust mil v° li'3'."
Signé : " Camus. «
Ville, suyvant icelluy arres! ; les informations faictes, lant à la requeste du Procureur general du Roy, Prevost des Marchans et Eschevins, que d'icelluy d'Aronde; conclusions dud. Procureur general, pro­ductions des parties, conlredictz et salivations d'i­celles, estat des deniers receuz par le Recepveur de lad. Ville, à cause des maisons assises sur le Pont Nostre Dame, depuis le jour et feste sainct Jehan Baptiste mil vc xlviii; aultres conclusions dud. Pro­cureur general du Roy; emsemble tout ce qui a este produit par les parties, et tout consideré;
"Dit a esté que lad. Court a mys toutes lesd, par­ties hors de Court et de procès sans despens, dom­mages et interestz, ordonne que lesd. d'Aronde et Chardon seront respectivement cnlretenuz ès louaiges des maisons qu'ilz tiennent sur le Pont
associé qui lui payait de loyer plus que la Ville ne lui en réclamait à lui-même, et il forgeait au gros marteau, ce qui ébranlait le bâtiment et compromettait sa solidité.
Richard d'Aronde répondit par la bouche de Saint-Meloir, son avocat, qu'il n'avait point refusé de payer les quarante écus d'avance, mais bien cinquante qui lui avaient été demandés en surplus, contrairement aux termes de la délibération, et que son codemandeur, Antoine Chardon, était dans lo mème cas. En effet, ce dernier, qui était présent à l'audience, déclara qu'il s'était pré­senté à l'Hôtel-de-Ville, devant le Bureau où étaient le Prévôt des Marchands, l'Echevin Du Fay (sans doute un titre de fief de Nicole Lo Cirier, comme nous l'avons vu ailleurs), et Perdrier, Greffier, et qu'ayant offert les quarante écus d'avance, le Prévôt des Marchands lui avait répondu qu'il ne voyait pas de moyen de renouveler le bail de sa maison, à moins qu'il ne payât encore cin­quante écus. "El. lors led. Grellier Perdrier demanda aud. Prevost s'il entendoit en ces cinquante escuz comprendre les quarante, el led. Prevost lui respondit que non, niais cinquante oultre les quarante."
Le Prévôt des Marchands, Louis Gayant, qui avait comparu en personne, fit au procureur du Roi, qui l'interrogeait, cette réponse que nous donnons intégralement, parce qu'elle explique la manière de procéder du Bureau de la Ville en matière de renouvellement dc baux : "Dict qu'il n'entendit jamais parler de cinquante oultre quarante. Car lorsque Chardon alla à l'Hostel de la Villo, sa mai­son estoit ja baillée, parce qu'il n'avoit fait ses diligences. Et failloit entendre qu'il y avoit trois manieres de conducteurs et habita-teurs qui furent considérez au Bureau de la Ville : assavoir les anciens preneurs qui tousjours de baulx en baulx ont esté continuez, ct leurs ayans cause, excepté ceulx qui avoient delinqué et contrevenu à leurs baulx ; les preneurs depuis neuf ans, el ceulx qui ve­noient nouvellement pour prendre. Quant aux anciens preneurs, on ne leur demanda jamais riens oultre les quarante escuz délibérez en l'assemblée de Ville, ne à ceulx depuis neuf ans, qui avoient auparavant donné quelque chose à la Ville, pour avoir confirmation de leur bail, lesquelz ilz reputoient comme anciens preneurs. Et aux nouveaulx preneurs qui n'avoient aucune chose donné, on leur remonstra qu'il failloit qu'ilz feissent quelque honnesteté à la Ville, comme avoient faict les anciens. Les aulcuns de ces nouveaulx offrirent vingt escuz ct aultres quinze, aultres dix ou douze, aultres moins, que l'on cognoissoit estre pauvres, ct ces pauvres on admonestoit de ne point reveller ce qu'ilz avoient baillé, à ce que les aulres plus riches qui avoient plus baillé ne se mutinassent. Et voilà comment on s'est conduict en l'affaire."
Après ces explications quelque peu embarrassées, le Procureur du Roi prit la parole et blâma le Prévôt des Marchands de ne point s'être tenu aux termes de la délibération et d'avoir exigé plus que la somme fixée. Il aurait pu ajouter que ce syslème de pots de vin appliqué aux nouveaux preneurs menaçait les anciens dans leur possession, puisque la Villo exigeant une plu3 forte somme des premiers que des seconds, avait tout intérêt au changement. Par suite, Ia déposition du Prévôt était plutôt une présomption en faveur des demandeurs qu'une justification des faits reprochés au Bureau de la Ville. Du reste, la Cour, quoique réservant son jugement définitif après plus ample informé en ce qui concernait les contraventions reprochées à de Bornay, et après interrogatoire de l'Echevin et du Grellier, pour co qui avait trait à la somme exacte que le Bureau de la Ville avait exigé de Richai d d'Aronde et d'Antoine Chardon, la Cour ordonna que par provision les 1rois marchands seraient continués en leurs baux, après avoir avancé les quarante écus fixés par la délibération, et que tous les deniers prélevés en plus par la Ville sur les nouveaux preneurs seraient consignés jus­qu'à nouvel ordre au Greffe de la Cour.
On voit ici que l'arrêt définitif so fit attendra plus de trois ans, mais qu'il donna gain de cause aux locataires du Pont Notre­Dame.
O C'est le 27 mars i548 (n. s.), et non le 17, que cette délibération eut lieu. Voy. ci-dessus, p. 120 du présent volume.
(-) "Deffences d'avoir soubs locataires aulx maisons du Pont Notre-Dame." Note marginale, d'une écriture plus récente.
(3) Le texte de cet arrêt a été collationné sur le registre du Conseil du Parlement (Archives nationales, X" 1570, fol. io4 v°), ce qui nous a permis de rectifier certaines erreurs du commis qui le transcrivit sur le Registre de la Ville.